Revue de presse économique de l’APST du 1er au 10 Décembre 2022
Avec Les Partenaires de l’APST
Aérien
Pour le directeur de l’IATA, interdire les vols courts est « absurde »
L’interdiction de l’avion sur les liaisons intérieures desservies en moins de 2 h 30 en France est « complètement absurde », a estimé ce mercredi le directeur de l’Iata , Willie Walsh, lors d’une conférence consacrée aux efforts de décarbonation du transport aérien, à Genève.
« C’est une mauvaise décision, qui n’a aucune efficacité », explique le dirigeant de l’association des grandes compagnies aériennes internationales. « Même si on éliminait tous les vols de moins de 500 km en Europe, y compris ceux qui ne peuvent être remplacés par des trains comme Dublin-Londres, on supprimerait 24 % des vols mais on ne réduirait que de 3,84 %, les émissions de CO2 du transport aérien », a-t-il souligné, en citant une étude d’Eurocontrol .
Un « ciel unique » plutôt que des taxes
« En revanche, une réforme du contrôle du trafic aérien, avec la mise en place d’un « ciel unique européen » , permettrait de réduire les émissions de 10 % », a ajouté Willie Walsh, appelant les « politiciens » à « baser leurs décisions sur des faits » et sur « la recherche d’efficacité », plutôt que de chercher les effets d’annonce. « Beaucoup de décisions n’auront aucun impact significatif sur le climat », souligne-t-il.
Le directeur de l’Iata, dont les quelque 300 compagnies membres se sont engagées à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, n’est pas tendre pour certains aspects de la politique environnementale européenne. « Il y a, en Europe, des politiciens dont l’objectif véritable est de réduire l’accès au transport aérien, en le rendant trop coûteux pour la majorité de la population, estime Willie Walsh. Cette vision européenne n’est pas partagée dans les autres régions du monde, où l’on reste attaché au développement du transport aérien. »
« Limiter l’accès des avions aux plus riches »
Le directeur général de l’Iata reconnaît néanmoins que la décarbonation du secteur se traduira par un renchérissement de l’avion. « Il faut être honnête et reconnaître que la transition énergétique aura un coût et un impact sur la demande, poursuit le directeur de l’Iata. Mais multiplier les taxes dites « environnementales » pour générer des recettes fiscales en limitant l’accès des avions aux plus riches n’est pas une solution pour l’environnement. »
Le transport aérien face à l’envolée des prix des billets
Selon l’Iata, les investissements nécessaires pour permettre au transport aérien d’atteindre la neutralité carbone seraient de l’ordre de 3.000 milliards de dollars. Rien que l’intégration de 10 % de carburants d’aviation durable à l’horizon 2030 représenterait un investissement de 250 milliards de dollars. Une somme qui ne pourra être absorbée par les compagnies aériennes, encore dans le rouge en 2022, sans une hausse supplémentaire des prix des billets d’avion.
https://www.lesechos.fr 07/12/2022.
Transport aérien et environnement : comment poser le problème ?
Le transport aérien nourrit nombre de controverses environnementales comme le montre l’actualité en France de ces dernières années. Il y a bien entendu eu le projet nantais d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes auquel le gouvernement a renoncé en 2018, mais aussi l’arrêt du projet de mégacentre de loisirs EuropaCity en 2019, envisagé aux abords de l’aéroport de Roissy, puis l’abandon du Terminal 4 en 2021, qui devait augmenter de 50 % sa capacité.
Entre-temps, la question de la privatisation d’Aéroports de Paris s’est invitée durant les débats sur le projet de loi Pacte. À cette occasion, près de 250 parlementaires se sont mobilisés, demandant un référendum d’initiative populaire relatif au maintien du statut public de l’autorité. Si la requête n’a pu réunir le quorum exigé par la loi, le projet de privatisation s’est vu retarder alors que la pandémie liée au coronavirus mettait à l’arrêt les aéroports.
Cible récurrente du débat public, le développement de l’aviation fait surgir d’autres questions encore : celle d’une sécession des élites qui s’affranchiraient des contingences terrestres (souvenons-nous de la polémique sur les jets privés) ou celle des crises énergétiques qui mettent à jour les obstacles techno-politiques à la sortie des énergies fossiles.
Pourtant, comme l’ont montré nos travaux, les devenirs du transport aérien ne peuvent être saisis seulement à partir de « crises » dont les « problèmes » nécessiteraient d’être « résolus ». Si des controverses ont permis d’approfondir les enjeux à l’œuvre, en offrant une arène pour le débat public, d’autres sont restées au stade de la polémique. Pour poser le problème dans son ensemble, trois questions paraissent cruciales : la mesure des effets du transport aérien, l’empreinte de son infrastructure et le temps de sa transition.
Des chiffres incomplets
Pour comprendre le rôle de la mobilité aérienne dans les désordres environnementaux, il convient d’abord d’en mesurer les effets globaux. La tâche n’est cependant pas aisée du fait du caractère mondial des données nécessaires et du mode d’élaboration des indicateurs destinés à apprécier la grandeur du problème. Que compte-t-on dans les sources, les volumes, les natures et les impacts des émissions ?
La contribution du transport aérien au changement climatique est actuellement calculée sous la forme d’un pourcentage estimé autour de 4 % selon les dernières études scientifiques de référence (Atmospheric Environment, Environmental Research, The Shift Project). Sa mesure intègre les émissions de dioxyde de carbone mais aussi celles des autres gaz à effet de serre comme les oxydes d’azote, l’ozone ou le méthane. Sont également considérés les effets des cirrus, ces nuages issus des traînées de condensation qui aggravent le forçage radiatif.
Les efforts demandés au secteur aérien pour rester dans la limite d’un réchauffement global de 1.5 °C se heurtent néanmoins à la partialité des chiffres sur lesquels sont fondés les accords internationaux climatiques. D’une part, seules les émissions de CO2 sont prises en compte et non les émissions hors CO2 qui sont significatives.
D’autre part, le trafic aérien international est exclu des objectifs fixés pour les États, qu’il s’agisse du protocole de Kyoto ou des accords de Paris. Les chiffres sont là pour montrer l’ampleur des écarts entre ce qui est pris en compte et ce qui compte. En France, la Direction générale de l’aviation civile a mis au point un outil de mesure nommé Tarmaac (pour Traitements et analyses des rejets émis dans l’atmosphère par l’aviation civile) qui estime les émissions des vols intérieurs (Métropole et Outre-mer) ainsi que celles des vols internationaux touchant la France (chaque vol étant compté pour moitié de ses émissions). Si les émissions liées aux déplacements intérieurs ont tendance à baisser, celles du trafic international, qui représentent 80% du volume total, ont augmenté de 40% entre 2000 et 2019.
La réception des chiffres est quant à elle contrastée. Les uns relativisent l’importance du transport aérien au regard des secteurs de la construction ou des transports terrestres, bien plus émetteurs en volumes globaux. Mais la comparaison vaut-elle entre le déplacement dans les airs, non démocratisé car non vital, et l’habiter sur terre qui concerne tout un chacun ? D’autres au contraire soulignent l’importance de ce chiffre, privilégiant sa valeur absolue mise en regard de la question des limites planétaires.
Un autre indicateur est parfois utilisé : le taux d’émission par passager par kilomètre parcouru. Comparé au train, l’avion est très émetteur ; avec l’automobile, il est à égalité. La mesure par kilomètre pose toutefois la question de l’impact écologique de l’accélération, car on ne franchit pas les mêmes distances en automobile et en avion.
Comme le soulignent l’économiste des transports Yves Crozet et le sociologue Hartmut Rosa, l’augmentation des vitesses de transport a produit, non pas un « gain » de temps pour les usagers, mais un allongement des distances parcourues. Il serait donc plus juste de comptabiliser le facteur du temps de transport pour mesurer les effets comparés des modes de déplacement. C’est ce que propose l’économiste de l’environnement Aurélien Bigo, dont les calculs font grimper l’aviation en haut des transports les plus émetteurs.
Infrastructure, territoire et culture
Toutes ces analyses, en outre, ne tiennent compte que d’une partie du problème car elles ne mesurent que les impacts des vols stricto sensu, oubliant les infrastructures aéroportuaires et la construction aéronautique sans lesquelles les avions ne pourraient pas voler. Comment mesurer la globalité des empreintes du transport aérien, qui comprend les cycles de vie des aéronefs, l’impact des aéroports et l’environnement des vols ?
Scruter la contribution de la mobilité aérienne aux changements globaux suppose de mettre à jour ses « moteurs immobiles » comme l’énonçait Bruno Latour. Avec le transport aérien, la construction aéronautique et l’infrastructure aéroportuaire forment les piliers d’un macro-système au sein duquel opèrent des entreprises qui agissent sur la scène globale des groupes mondiaux. Désir de mouvement, globalisation des flux, accélération des vitesses, épreuves du risque ont aussi produit une longue traîne d’influences et d’expériences, façonnant une culture aérienne qui a métamorphosé nos relations aux territoires, leur espace, leur histoire, leurs échelles.
Ainsi, l’emprise de l’infrastructure aérienne est ample et diffuse. Elle ne saurait être réduite aux seules plates-formes sur lesquelles atterrissent les aéronefs. Il faut aussi compter les sites et leurs dépendances, les clôtures et leurs rives, les voies d’accès qui l’irriguent, les routes aériennes et les territoires qu’elles survolent, les institutions qui la soutiennent, les produits et les dérivés qui l’alimentent.
Dès lors, matérialiser son empreinte permet de comprendre ce qui se joue dans les divergences d’intérêt dont font l’objet les grands projets contestés, d’envisager les alternatives aussi, et les réversibilités.
Penser le temps de la transition
Si comprendre les impacts du transport aérien est difficile à mesurer, appréhender ses futurs l’est tout autant. Sa croissance mondiale s’annonce florissante, autour de 5 % par an, soit un doublement de son niveau en 15 ans. L’Organisation de l’aviation civile internationale prévoit quant à elle une multiplication par quatre des volumes d’émissions d’ici 2050.
À ces trajectoires qui divergent de l’impératif climatique, tentent de répondre les prospectives qui parient sur l’innovation technologique et énergétique. Pourtant, si nous considérons la seule question énergétique, la recherche sur des alternatives non fossiles – biocarburants et carburants de synthèse, électricité et hydrogène – soulève tout un ensemble de questions sur les possibilités d’y parvenir, sur les ressources mobilisables (eau, énergie, cultures intensives), sur l’adéquation des flottes existantes ou sur la durée des amortissements des investissements. L’actualité de la crise, en Europe et en France, montre par ailleurs la persistance d’un « mix » qui agrège les énergies fossiles et renouvelables, modifiant et renforçant en même temps les structures économiques et politiques qui les soutiennent.
Du temps est nécessaire comme le montre le cas de l’automobile dont le modèle électrique est pourtant possible sur le plan technologique. En effet, la pertinence d’une transition massive soulève bien des questions sur le plan écologique, par ailleurs en butte à maints obstacles : poids des batteries, disponibilité des métaux rares, volumes d’énergie, coûts sociaux… Ces paris incertains ne peuvent donc être exclusifs d’autres options que sont la sobriété, la réduction et la régulation.
Omniprésent et ambigu, le terme de transition est souvent entendu comme un temps linéaire et défini à l’issue duquel seraient surmontées les crises, nous projetant dans un « monde d’après » dont nous peinons peut-être à comprendre qu’il ne ressemblera à rien du monde d’avant.
Confrontés à la question de son (in)habitabilité, les citoyens de la terre gagneraient à être mieux éclairés sur notre présent, ce « plasma dans lequel baignent les phénomènes et comme le lieu de leur intelligibilité » nous disait l’historien Marc Bloch. Forte de son histoire pluriséculaire, l’économie aérienne peut-elle y parvenir ?
https://theconversation.com 30/11/2022.
Le dernier Boeing 747 est sorti des chaînes, comment le géant a révolutionné le transport aérien
Le Boeing 747 restera dans l’histoire pour avoir été le plus grand, le plus vaste, le plus étonnant des avions de ligne avec sa bosse caractéristique. L’un des seuls affublé d’un surnom, le Jumbo-jet, mais surtout celui qui, dans les années soixante-dix, a révolutionné le transport aérien en accélérant sa démocratisation.
1 574 exemplaires fabriqués
Ce mardi 6 décembre (mercredi en France), dans la nuit américaine de Seattle, siège historique du constructeur Boeing, l’immense usine d’Everett a ouvert ses portes pour libérer ce qui restera comme le dernier des 747, cinquante-quatre ans après la présentation du premier de la série, en 1968, et quelque 1 574 exemplaires assemblés par le géant américain.
Signe de son déclin, l’avion, une version 747-8F qui sera livrée à la compagnie de transport Kühne-Nagel A et exploitée par Atlas Air, est un cargo et pas une version passagers, que petit à petit les compagnies retirent de leur flotte, une décision déjà prise par Air France en 2016, notamment. Pour autant, par ses dimensions, 76,2 m de long, cet ultime 747 incarne bien l’histoire d’un géant, auquel le succès n’était pas fatalement promis.
Le règne des géants
« Depuis plus d’un demi-siècle, des dizaines de milliers d’employés dévoués de Boeing ont conçu et construit ce magnifique avion qui a véritablement changé le monde », se félicitait mardi soir Kim Smith, vice-président de Boeing, en charge des programmes 747 et 767. Et pour cause : lorsqu’il est présenté en 1968, à la suite d’une demande de la défunte compagnie Pan Am, le marché du transport aérien est en pleine croissance, porté par les débuts du tourisme de masse et les premiers jets qui ont réduit les distances en tutoyant les 900 km/h. La Pan Am veut accélérer : un avion plus grand, ce sera plus de sièges, le coût du vol réparti sur un plus grand nombre de passagers et donc… un billet moins cher.
Pour construire le 747, Boeing avait dû bâtir à Everett une des plus vastes usines au monde. Pour construire le 747, Boeing avait dû bâtir à Everett une des plus vastes usines au monde.
L’investissement est considérable, une nouvelle usine doit être construite – aucune n’est à sa taille – les difficultés techniques sont incommensurables – il est si lourd -, les problèmes – notamment de moteurs – mettront Boeing au bord du naufrage. Mais lorsqu’il est mis en service le 22 janvier 1970, le 747-100 peut emporter d’un seul coup jusqu’à 550 passagers contre 189 dans la plus grande version de son aîné, le 707. Et sur une distance folle : 15 000 km d’un seul jet pour le 747-8 de dernière génération.
L’A380, son rival éphémère
Timides au départ, les commandes de l’avion au double pont – ceux qui ont eu la chance de voler en business dans sa bosse en gardent un souvenir impérissable – décollent à partir de 1977, atteignent leur sommet en 1990 (122 unités). Durant ces vingt premières années, l’avion accompagne la croissance du trafic aérien, déplace des millions de touristes dans le monde entier, relie les continents entre eux.
Les ventes connaissent encore un pic en 2006 et s’effondrent. Quadrimoteur, l’avion est coûteux, vorace en carburant, concurrencé sur le long courrier par les B777 et Airbus A330, avant que le coup de grâce ne lui soit donné par les B787 et autre A350.
Le 747 volera encore plusieurs années, notamment en version cargo. Mais sa fin annoncée suit celle de son éphémère rival, l’Airbus A380, dont la production s’est arrêtée il y a déjà plus d’un an et que de nombreuses compagnies ont déjà mis au rancart…
https://www.midilibre.fr 07/12/2022.
Le transport aérien mondial sur le fil du rasoir
L’Association du transport aérien international (IATA) prévoit un retour à la rentabilité des compagnies aériennes en 2023. Mais avec une marge estimée à 0,6%, soit un bénéficie de 1,11 $ par passager, l’équilibre est précaire, et le moindre incident de parcours peut remettre en question cette amorce de redressement.
En 2023, les compagnies aériennes s’attendent à enregistrer un modeste profit net de 4,7 milliards $, ce qui représente une marge bénéficiaire nette de 0,6 %. C’est le premier profit depuis 2019, alors que le bénéfice net de l’industrie était de 26,4 milliards $ (marge bénéficiaire nette de 3,1 %), fait remarquer l’IATA.
En 2022, les pertes nettes des compagnies aériennes devraient atteindre 6,9 milliards $ (une amélioration par rapport aux pertes de 9,7 milliards $ pour 2022 annoncées dans la prévision de juin de l’IATA). Il s’agit d’une amélioration importante comparativement aux pertes de 42,0 milliards $ et de 137,7 milliards $ subies en 2021 et 2020 respectivement.
S’il parle d’un « exploit », Willie Walsh, directeur général de l’IATA, demeure prudent : « … des bénéfices de 4,7 milliards $ sur les revenus de 779 milliards $ de l’industrie illustrent le fait qu’il y a encore beaucoup de rattrapage à faire pour rétablir des bases financières solides pour l’industrie aérienne mondiale. » L’ensemble des revenus devrait croitre de 43,6 % par rapport à 2021, pour atteindre 727 milliards $.
Selon les économistes de l’IATA, « la reprise de la demande dans l’industrie se limitera à 70,6 % du niveau d’avant la crise. », en ce qui concerne le transport de passagers. En juin, ils tablaient sur 82,4 % du niveau d’avant la crise. En revanche, ils s’attendaient à ce que le trafic de fret dépasse de 11,7 % le trafic d’avant la crise, mais selon leur prévision actuelle, il devrait plutôt atteindre 98,4 % du niveau de 2019.
En 2023, l’industrie aérienne prévoit renouer avec la rentabilité. Les compagnies aériennes devraient réaliser des bénéfices nets de 4,7 milliards $ sur des recettes de 779 milliards $ (marge nette de 0,6 %). Cette amélioration prévue survient malgré l’incertitude économique croissante, alors que la croissance du PIB mondial ralentit à 1,3 % (contre 2,9 % en 2022).
« Malgré l’incertitude économique, il y a une foule de raisons d’être optimiste au sujet de 2023. Un taux d’inflation des prix du pétrole moins élevé et la demande latente persistante devraient aider à contrôler les coûts alors que la forte tendance de croissance se maintient. En même temps, avec une marge bénéficiaire aussi mince, même un changement minime de l’une des variables peut faire passer le bilan en territoire négatif. La vigilance et la souplesse seront essentielles », ajoute M. Walsh.
L’IATA prévoît que le nombre de passagers devrait excéder les quatre milliards pour la première fois depuis 2019, la prévision étant établie à 4,2 milliards de passagers aériens. En 2023, la demande devrait toujours être inférieure à celle de 2019. L’IATA l’estime à 85,5 % du niveau de 2019. Côté fret, les revenus prévus seront de 149,4 milliards $, soit 52 milliards $ de moins qu’en 2022, mais 48,6 milliards $ de plus qu’en 2019. « En raison de l’incertitude économique, les volumes de fret devraient diminuer pour s’établir à 57,7 millions de tonnes, après un sommet de 65,6 millions de tonnes en 2021. », précise l’IATA.
L’une des principales incertitudes réside évidemment dans le prix du pétrole. « La facture totale de carburant en 2023 devrait s’élever à 229 milliards $, soit 30 % des dépenses. », affirme l’IATA dont la prévision est fondée sur un prix du Brent à 92,3 $ par baril (en baisse par rapport au prix de 103,2$/baril en 2022.) Le kérosène devrait atteindre une moyenne de 111,9 $/baril (en baisse par rapport au prix de 138,8$/baril). « La diminution reflète la relative stabilisation des approvisionnements de carburant après les perturbations initiales associées à la guerre en Ukraine. »
L’IATA prévoit que les résultats financiers de toutes les régions vont continuer de s’améliorer après les lourdes pertes de 2020. L’Amérique du Nord sera la seule région à avoir retrouvé la rentabilité en 2022, selon ses évaluations. Deux autres régions vont y parvenir en 2023 : l’Europe et le Moyen-Orient, tandis que l’Amérique latine, l’Afrique et l’Asie-Pacifique vont demeurer déficitaires.
« Le travail des compagnies aériennes va demeurer difficile et il sera crucial de surveiller étroitement les incertitudes économiques. La bonne nouvelle est que les compagnies aériennes auront rendu leurs modèles d’affaires plus souples, de façon à composer avec les mouvements d’accélération et de décélération de l’économie qui ont des impacts sur la demande. », résume le directeur de l’IATA.
https://www.aerobuzz.fr/ 07/12/2022.
Tourisme
Le leader européen des résidences de tourisme, propriétaire de Center Parcs, augmente ses prix et ses marges
Désendetté, restructuré, Pierre & Vacances veut accélérer sa montée en gamme. L’objectif est double: dynamiser les ventes et s’imposer comme un spécialiste du tourisme de proximité, avec une offre plus qualitative. Leader européen des résidences de vacances (160 adresses en France et en Espagne), également propriétaire de 29 villages Center Parcs, l’entreprise a pris ce virage avec force depuis plus d’un an, dans le cadre du plan «Réinvention 2025». Face à une concurrence agressive (locations saisonnières, clubs de vacances, hôtels…) et des consommateurs plus exigeants, c’était devenu une nécessité.
Malgré leur forte notoriété, les marques du groupe souffrent d’une image vieillissante, à cause d’un parc insuffisamment entretenu. Dans le cadre d’une «modernisation radicale» de l’offre, 52 résidences de tourisme sont désormais neuves ou rénovées. Comme à Flaine, où certains appartements ont une cheminée, en plus de larges baies vitrées. Chez Center Parcs, 85 % des cottages sont neufs ou rénovés. L’objectif est d’atteindre 100 % d’ici à 2025, après plus de 700 millions d’euros d’investissements en quatre ans. Selon la classification maison, 53 % des cottages Center Parcs sont VIP ou premium, c’est-à-dire plus spacieux et à la décoration contemporaine. Les chalets les plus luxueux ont leur bain à remous, voire un sauna.
Réduire les coûts
Les améliorations portent déjà leurs fruits sur la fréquentation et les tarifs. En un an, le prix moyen a augmenté de 23 % chez Center Parcs, les clients acceptant de payer plus pour davantage de confort. Ouvert en mai, le nouveau domaine Les Landes de Gascogne illustre bien cette montée en gamme: en plus de 401 cottages en bois, un espace aquatique géant, une vingtaine de maisons dans les arbres et à la ferme, il propose deux restaurants et des dizaines d’activités (jardins potagers, bowling…). Succès immédiat, il était plein cet été.
Les performances de 2021-2022 (clos fin septembre) rassurent. L’activité du groupe est supérieure à ses niveaux d’avant-Covid, avec un chiffre d’affaires de 1,7 milliard d’euros (+ 13%). Le profit net s’élève à 325 millions, grâce aux performances opérationnelles et au gain lié à la conversion de dette en capital. Après une accumulation de pertes et dettes ces dernières années. Pierre & Vacances rend désormais des comptes au trio d’investisseurs Alcentra, Fidera et Atream, qui a sauvé l’entreprise, en en prenant le contrôle.
Bouclé en septembre, leur plan de redressement a permis d’apporter 200 millions d’euros d’argent frais, en plus d’une conversion en capital de 550 millions d’euros de dette. En plus de repositionner l’offre, ils passent au crible les dépenses, dans l’optique de réaliser 60 millions d’économies d’ici à 2026. « Nos coûts de structure sont trop élevés », reconnaît Franck Gervais, directeur général de Pierre & Vacances. En septembre, 81 postes en France et 24 aux Pays-Bas ont été supprimés, après l’externalisation des services de paie et comptabilité. À Paris, le passage au « Flex office » va permettre de réduire de 40 % les surfaces du siège.
https://www.lefigaro.fr/ 01/12/2022.
L’explosion du tourisme à Athènes menace les sites antiques
Cette année, le secteur touristique athénien a défié toutes les attentes, et devrait enregistrer plus de 18 milliards d’euros de recettes, pour près de 30 millions de visiteurs, ce qui représente près de trois fois la population totale du pays.
En dépit de la pandémie de Covid-19, qui a notamment condamné le tourisme chinois, de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui avait stoppé les réservations en février 2022, et de l’irruption impromptue de méduses pélagiques dans les eaux grecques due au dérèglement climatique, les recettes sont inespérées, et la Grèce est devenue la troisième destination touristique la plus populaire du monde. Pour autant, ce tourisme de masse en pleine expansion n’est pas sans conséquences.
Dans les rues de Plaka, qui borde l’Acropole de ses multiples échoppes destinées aux touristes, les commerçants n’ont jamais aussi bien marché, mais sont conséquemment rompus : « S’il y a une chose que nous voulons, c’est qu’ils rentrent chez eux maintenant. Nous sommes tous épuisés, alors même que la direction emploie du nouveau personnel », lâche Anna Simou, qui travaille dans un magasin de design grec contemporain dans le quartier.
Trouver un équilibre
Si Athènes était auparavant surtout considérée comme une voie de transit vers les îles, plus de 7 millions de touristes s’y sont rendus en 2022, et cette concentration inquiète les pouvoirs publics, qui cherchent un moyen de répartir plus équitablement l’industrie touristique sur tout le territoire.
Mais l’explosion du tourisme de masse suscite surtout des inquiétudes face à la conservation des sites antiques, qui doivent absorber des foules de visiteurs, et adapter leurs infrastructures à mesure.
Au total, la Grèce compte dix-huit sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco, et doit trouver un équilibre entre la protection de ses monuments historiques, et le développement de ces derniers à des fins touristiques.
En 2020, la fameuse Acropole avait déjà été au centre d’une controverse, alors que le gouvernement avait fait installer des allées en béton ainsi qu’un ascenseur pour améliorer l’accessibilité du site à tous les visiteurs.
« Les voyants rouges clignotent, assure Peter DeBrine, principal conseiller de l’Unesco en matière de tourisme. Nous devons commencer à nous demander ce qui est trop, et 16.000 visiteurs qui encombrent chaque jour un monument comme l’Acropole, c’est beaucoup trop. »
Selon DeBrine, il devient impératif d’adopter des mesures de capacité sur les sites les plus populaires, et de mettre en place un tourisme durable. « Ce qu’il faut, c’est une approche radicalement différente, qui commence par les consommateurs mais s’étend à la gestion du tourisme et du patrimoine. Il est clair que les autorités doivent prendre des mesures pour désengorger les sites du patrimoine mondial si l’on veut assurer leur conservation, et faire en sorte que l’expérience touristique ne soit pas dégradée. »
https://www.numero.com 03/12/2022.
Un tourisme 4 saisons, le défi que relèvent ensemble des communes françaises et suisses
Dans les Alpes, onze communes françaises et suisses développent ensemble, le tourisme 4 saisons. En dehors de l’hiver, les pratiquants de trail running et de VTT électrique se lancent à l’assaut des sommets aux Portes du Soleil, le plus grand domaine skiable transfrontalier du monde. « On passe du côté suisse et du côté français en un tour de pédale, » fait remarquer Thierry Favre, codirecteur de Ride Switzerland.
Elles sont aussi huit communes françaises et trois suisses dont Champéry à participer à un projet européen appelé « Renouveau estival des Portes du Soleil » qui vise à faire découvrir le patrimoine naturel et culturel tout en fidélisant une nouvelle clientèle, et ce dans un contexte de changement climatique.
Florian Legrand s’essaie à deux nouvelles disciplines proposées entre le printemps et l’automne, en commençant par le VTT électrique pour lequel on trouve sur place, 600 km de pistes.
« Je n’ai pas du tout l’habitude du vélo électrique, c’est un sport assez doux, on peut le faire en étant encadrés et cela permet de voir la montagne autrement que via le ski, » estime-t-il. « Sur les autres saisons, cela apporte quelque chose de complémentaire, c’est très intéressant, » indique-t-il.
Soutien européen
Le budget total de ce projet est d’un million et demi d’euros dont un peu plus de 600 000 financés via la politique européenne de cohésion, la France et la Suisse apportant 46,5% de l’ensemble du budget.
En saison estivale, les 12 stations du domaine sont reliées grâce la mise en service de 25 télésièges.
En plus des parcours de VTT, « Renouveau estival des portes du soleil » a permis de proposer 55 parcours de trail running transfrontaliers, visibles sur l’application du projet.
Florian teste le numéro 41 en compagnie de deux champions de la discipline, Gaël Sierre et Aurélien Bovard au Col du Saix près de La Chapelle d’Abondance.
Tous les parcours sont gratuits. La découverte du domaine hors saison de ski attire de plus en plus de monde. Le coordinateur du projet Benoît Cloirec égraine quelques chiffres.
« Si l’on prend le VTT, aux remontées mécaniques, cette année, on a fait 1 700 000 passages, » précise-t-il. « Sur les piétons, on a plus de 800 000 personnes cet été qui ont pu naviguer sur le domaine grâce aux remontées mécaniques, » ajoute-t-il.
https://fr.euronews.com 06/12/2022.
La reprise du tourisme chinois prendra du temps
Alors que les mesures Covid vont être allégées en Chine, le retour des touristes chinois à l’international prendra du temps…
La Chine a enfin décidé d’alléger ses lois concernant le Covid cette semaine avec 10 mesures d’assouplissement.
Les personnes contaminées par le Sars-Cov-2 et qui sont asymptomatiques ou avec des symptômes légers pourront effectuer leur quarantaine chez eux pendant 7 jours plutôt que dans un centre dédié. Ils pourront être transportés dans des hôpitaux désignés si leur état s’aggrave.
Les nouvelles mesures visent par ailleurs à définir plus finement les zones à risques soumises à des confinements après la découverte de cas positifs comme un immeuble, un étage ou un foyer au lieu de quartiers entiers. La levée du confinement aura lieu en 5 jours sans nouvelle contamination.
Par ailleurs la fréquence et la porté des tests vont être réduites. La Chine va favoriser l’utilisation de tests antigéniques au lieu des tests PCR. Ces derniers vont être réservés aux zones à hauts risques.
Enfin une mesure très attendue a enfin été décidée : les gens n’auront plus à montrer les résultats d’un test PCR négatif ou un QR Code pour entrer dans des lieux publics ou voyager sauf pour aller dans les hôpitaux, les écoles ou les maisons des personnes âgées.
Jusqu’à présent les habitants devaient être internés dans des camps de quarantaine si positifs et devaient être testés plusieurs fois par semaine pour aller dans les lieux publics. Une dictature sanitaire extrême qui a conduit à de nombreuses manifestations dans le pays ces derniers mois.
Les autorités recommandent désormais l’arrêt des campagnes de dépistage de grande envergure au niveau régional pour privilégier des campagnes plus ciblées et surtout moins fréquentes.
Les citoyens chinois peuvent désormais voyager dans d’autres régions chinoises sans restrictions
Les citoyens chinois vont également pouvoir voyager d’une province à l’autre sans présenter de test PCR de moins de 48H et sans avoir à effectuer de test à l’arrivée.
Cette dernière mesure devrait favoriser les voyageurs domestiques dans le s prochaines mois.
Concernant les voyages internationaux des citoyens chinois, la reprise n’est pas en vue. Selon un sondage réalisé auprès de 4000 consommateurs en Chine par Oliver Wyman les citoyens chinois sont peu confiants pour voyager à l’étranger. 51% des sondés prévoient de retarder leurs voyages internationaux.
Et s’ils voyagent les destinations proches seront favorisées comme Hong Kong. Cette timidité à faire des voyages lointains s’explique par le fait que les citoyens chinois sont inquiets des procédures d’entrée à leur retour, ce qui peut se comprendre vu la politique menée jusqu’à présent.
Avant la pandémie, la Chine était le plus grand marché touristique sortant au monde (en volume). Les voyageurs chinois ont disparu de la planète avec l’arrivée du Covid en 2020.
L’allègement des mesures 0 Covid est une excellente nouvelle pour la Chine et le peuple chinois. Il reste à espérer que les Etats-Unis et la Russie négocient pour mettre fin à la guerre en Ukraine afin que l’économie mondiale puisse reprendre sa croissance.
https://www.businesstravel.fr 07/12/2022.
L’OMT et la Communauté de Madrid ont réuni 18 experts du monde entier pour partager des idées, débattre et explorer les défis et les tendances du tourisme culturel
La réunion s’est concentrée sur la gestion stratégique des ressources culturelles des destinations, y compris le défi de la gestion des flux touristiques à travers différents itinéraires ou produits combinés. Les experts ont également discuté de la manière de promouvoir les destinations moins connues en dehors des principaux circuits touristiques afin d’éviter la saturation des principales attractions touristiques. À cet égard, les experts ont par exemple examiné le rôle crucial de la promotion du tourisme, des stratégies de marketing et des partenariats public-privé pour le développement du tourisme culturel.
Les discussions ont porté sur l’identification des aspects qui mettent en péril la durabilité du tourisme culturel. Cela soulève l’éternel dilemme entre conservation et développement, et dans quelle mesure il est légitime d’exploiter les valeurs culturelles d’un territoire à des fins de croissance socio-économique.
Ion Vilcu, directeur du département des Membres affiliés de l’OMT, a souligné l’importance des valeurs culturelles pour la promotion des destinations. Il a ajouté que « l’OMT apporte des solutions aux conflits que la saturation touristique génère dans les principales destinations et sites culturels, ainsi que pour promouvoir le développement du tourisme dans les sites moins connus, en stimulant leur conservation et en favorisant les effets positifs que le tourisme génère en termes de développement socio-économique ».
Daniel Martinez, vice-ministre régional de la culture et du tourisme de la région de Madrid, a souligné l’opportunité pour la région de Madrid d’accueillir une réunion internationale aussi importante. « Nous sommes très heureux de faciliter la réflexion sur le modèle touristique essentiel de la région. Nous connaissons une forte augmentation des touristes de grande valeur qui nous visitent attirés par notre offre culturelle et patrimoniale, c’est pourquoi il est essentiel de comprendre les tendances du tourisme culturel et de promouvoir sa croissance durable, en générant des emplois et en attirant des investissements. »
Ces trois derniers jours, ces experts internationaux ont travaillé à l’élaboration de conclusions et de recommandations pour la gestion des destinations culturelles et touristiques qui figureront dans un rapport qui sera présenté en janvier prochain à l’occasion du Salon international du tourisme (FITUR). À cette occasion, les experts ont également eu l’opportunité de visiter l’exposition Picasso/Chanel au Musée national Thyssen-Bornemisza, ainsi que le site royal et la ville d’Aranjuez.
https://www.unwto.org/fr 07/12/2022
L’année Strava : les français n°1 sur le tourisme sportif selon la plateforme
L’année 2022 touche à sa fin, les villes se parent de leurs décorations de Noël et on se prépare pour les célébrations de fin d’année. C’est aussi l’heure de dresser le bilan de l’année écoulée et, bien sûr, de se plonger dans l’incontournable rapport Year in Sport de Strava.
Comme chaque année, le réseau social aux 100 millions d’utilisateurs à travers le monde dévoile les données édifiantes de la pratique du sport et se fait observatoire des tendances en matière d’activité physique.
Si en 2021 les athlètes ont doucement recommencé à voyager, en 2022, le pourcentage de sportifs ayant téléchargé des activités hors de leur pays de résidence a augmenté de 101 % par rapport à l’année dernière, atteignant presque, à 3 % près, le niveau de 2019, avant la pandémie.
Cocorico ! La France se place en première position sur le tourisme sportif dans le monde. En écho à ce phénomène, 25% des utilisateurs français sont allés hors de l’Hexagone pour découvrir de nouveaux territoires à la force de leurs muscles cette année.
En 2022, la France est le pays dans lequel les visiteurs étrangers ont effectué le plus d’activités sportives. Elle se place ainsi sur la première marche du podium devant l’Espagne et l’Italie. L’Hexagone réaffirme également son statut de territoire cycliste, puisque le vélo est le sport le plus pratiqué par les étrangers lors de leur visite sur le territoire français. Les chiffres Strava montrent qu’ils plébiscitent les régions proposant des ascensions légendaires, avec en tête la Haute-Savoie, suivie du Vaucluse puis de l’Isère.
La randonnée et la marche ne sont pas en reste, puisqu’elles se placent en seconde position de ce classement. C’est de nouveau la Haute-Savoie qui remporte les suffrages, suivie de Paris, puis des Alpes-Maritimes.
Enfin, en troisième place du classement, on retrouve la course à pied qui, d’après les chiffres, permet de lier la découverte au sport. Rien d’étonnant que Paris et son musée à ciel ouvert soient la zone géographique où les touristes étrangers courent le plus. Paris décroche également la place de 9e ville la plus visitée pour la course à pied à l’échelle mondiale. Après Paris, c’est en Haute-Savoie et dans les Alpes-Maritimes que les sportifs étrangers courent le plus.
Les étrangers ne sont pas les seuls à aimer la Savoie, puisque la région alpine est également la destination la plus populaire pour les utilisateurs français qui ont téléchargé des activités Strava ailleurs que chez eux.
https://www.widermag.com 09/12/2022.
À la recherche du tourisme perdu au Sahara nigérien
Ni les secousses du pick-up slalomant sur les pistes sahariennes du nord du Niger, ni la poussière brunissant peu à peu son habit bleu turquoise, n’ont entaché la joie d’El Gondj Ahmed quand les lumières de l’oasis d’Iférouane sont apparues dans la nuit claire.
Le convoi du député-maire était enfin arrivé dans son village niché entre montagnes et désert à l’avant-veille de l’ouverture du festival de l’Aïr, l’un des principaux du Sahara et grand raout de la culture nomade touareg qui a pris le nom du majestueux massif montagneux alentour.
A 1.200 km de la capitale Niamey, la citadelle Iférouane est devenue pendant trois jours, au delà des seuls touaregs, la vitrine touristique de tout un pays menacé sur quasiment chacune de ses frontières par la guerre menée par les jihadistes.
Quelque 5.000 personnes, en majorité des VIP locaux et quelques étrangers, y ont remplacé le calme du désert et la nonchalance de ses habitants par un charivari de véhicules 4×4 soulevant chacun plus de poussière que les autres.
Aux concerts et concours de beauté ont succédé de longues heures à discuter allongés sur des nattes au rythme des verres de thé, un éloge permanent des vertus des pick-up Toyota et surtout un régionalisme à peine caché. « La culture touareg, quoi », sourit le jeune Mohamed Bouhamid, habitant d’Iférouane.
S’il n’y avait pas tant de soldats autour, on pourrait se croire vingt ans en arrière, quand la manne touristique constituait une grande part de l’économie largement informelle de ces contrées désertiques et quand ceux qui sont devenus les chefs des rebellions étaient encore guides touristiques.
Le Niger était comme le Mali une destination prisée d’Afrique de l’ouest. Une compagnie aérienne ralliait directement Paris à Agadez, Gao, Kidal… Le Paris-Dakar est longtemps passé par ce désert.
Le fantasme de cette époque subsiste, et Niamey veut en profiter malgré les rebellions passées et désormais le jihadisme métastatique qui envahit le Sahel.
« Psychose »
Après l’assassinat de six Français en 2020 à quelques km de Niamey, la France, autrefois principal pourvoyeur de touristes, a décrété le Niger « zone rouge » et « fortement déconseillée ». A ceux désireux de venir à Iférouane, Paris a intimé de surseoir à ce voyage « des plus hasardeux”.
L’adjoint au maire Hamadi Yahaya peste contre « ces ambassades » qui « ont installé la psychose » alors que le conflit est à plus de 1.000 km d’Iférouane. Le supérieur, « l’Honorable » comme tout un chacun l’appelle, le martèle: « tout est sécurisé ici ».
En plus des soldats par endroits aussi nombreux que les festivaliers, des dizaines d’Ishumar, nom donné aux anciens rebelles, « ont été postés dans le désert alentour », ajoute l’ancien guide devenu chef de la rébellion, Rhissa Ag Boula, aujourd’hui conseiller du président Mohamed Bazoum.
Lors du trajet vers Chiriet, porte des dunes du Ténéré où s’est déroulée une partie du festival, leurs pick-up au fanion blanc reconnaissable étaient discrètement postés au loin. Ils encadraient le trajet transformé en une course aux allures viriles entre les quelque 80 conducteurs filant à bride abattue dans le sable.
Le méchoui y a été servi et les guitares électriques ont résonné sur les dunes roses – les deuxièmes plus hautes du Sahara selon la rumeur locale. « C’est comme jouer à la maison », dit le musicien Oumara Moctar dit Bambino: ce désert, c’est « là où nous sommes nés, là où nous avons grandi, ça nous rappelle de là où on vient ».
Le directeur italien de l’agence Société Voyages Sahariens (SAS), Rocco Rava, revient dans ces dunes pour la première fois en quinze ans. Il a grandi à Agadez, capitale régionale, et y a développé son activité touristique avant de se déporter sur le Tchad voisin quand les « turbulences » se sont emparées du Niger.
Tourisme et mitrailleuse
« Il y a une forte demande », dit-il en expliquant être venu étudier l’opportunité d’y ramener des touristes. Mais la situation est paradoxale, dit-il: « si c’est vraiment sécurisé, les touristes nous demandent pourquoi on doit avoir une escorte militaire ».
Niamey impose à tout occidental se rendant dans le désert une escorte armée et payante. « Dans quel pays du monde fait-on du tourisme avec une mitrailleuse devant et une autre derrière ? », demande anonymement un autre acteur du tourisme.
Il faut accepter que l’époque « d’avant » est révolue, dit le président du collectif des artisans d’Iférouane Kader Hamadédé, trente ans de confection de bijoux au compteur. Reste que « le tourisme qu’on aura à présent sera toujours avec les militaires, et je ne sais pas si ça intéresse les touristes… »
Tant pis: s’ils ne viennent plus à lui, lui ira à eux! Capitalisant sur ses contacts, Kader Hamadédé a inversé l’ordre des choses et se rend chaque année en France vendre bijoux et cuir tanné touaregs. « On est obligé de chercher à liquider notre stock ailleurs qu’ici », dit-il.
Partir semble un credo partagé par beaucoup : migration et orpaillage sont les maîtres mots du nord du Niger depuis quelques années. Mohamed Bouamid, 22 ans, part quatre mois creuser les profonds puits des sites d’orpaillage sahariens en espérant trouver fortune : « Il n’y a plus rien à faire ici ».
https://www.franceguyane.fr 08/12/2022.