Note de lecture n°12 « La France se prépare au grand retour des vacanciers »
Par Christophe Palierse
Journaliste, rubriques hôtellerie, restauration, tourisme, loisirs, jeux en ligne, économie du sport, du service ‘Services’ des Echos (depuis 2000).
Publié le 22/04/22
Alors que la crise sanitaire s’estompe, les réservations sont en hausse pour les professionnels du tourisme français, privilégié au cours des deux dernières années du fait de la pandémie de Covid. 2022 s’annonce même comme « une année record » pour bien des opérateurs. Le manque de ressources humaines pourrait toutefois affecter la qualité de service et l’activité.
Vents porteurs pour le tourisme français en cette sortie de crise sanitaire. Au moment où les vacances de Pâques battent leur plein, les perspectives de la destination France, confortée depuis deux ans par une prime à la proximité , apparaissent prometteuses. 2022 s’annonce même comme « une année record » pour bien des professionnels du secteur, grands et petits.
« Après une bonne saison d’hiver, les vacances de printemps ont bien démarré. On avait une petite interrogation sur la période mai-début juillet mais elle est en train d’être levée. Il y a un phénomène de rattrapage depuis une dizaine de jours. Et pour la période juillet-août-septembre, nos établissements se remplissent vite et bien, et depuis longtemps », témoigne Laurent Dusollier, le directeur général d’ Odalys, l’un des principaux opérateurs français avec un peu plus de 400 résidences de tourisme, appart’hôtels et campings commercialisés. De bon augure, si bien que ce dernier a prévu un chiffre d’affaires supérieur à son niveau d’avant la crise sanitaire.
La France a marqué des points
« Le Covid est derrière nous. Il y a eu un démarrage fort en juin 2021 et cette tendance se poursuit », confirme le président du directoire de Vacances Bleues, Jérôme Vayr, au vu de la demande pour ses 25 établissements. La progression de chiffre d’affaires est notamment de 13 % pour juillet-août par rapport à 2019, précise le dirigeant. « La destination France a marqué des points (pendant la crise sanitaire). Nous garderons de façon pérenne des clients qui ont changé leur habitude », espère-t-il.
Dans les campings, on pronostique déjà des niveaux d’activité supérieurs à ceux de 2019. Le nombre de réservations enregistrées est en hausse de 24 % à la fin mars par rapport à celui constaté trois ans auparavant, selon le panel de la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air (FNHPA), la croissance étant de 34 % en chiffre d’affaires. « Avril-mai et septembre sont très bons, voire top. Il semble que les gens veulent partir davantage encore sur les ailes de saison. Et l’été s’annonce très bon aussi », détaille le président de la FNHPA, Nicolas Dayot. S’agissant de la saison estivale, pic de l’année, la progression est de 31 % pour juillet et de 8 % pour août. Au final, le président de la FNHPA s’attend à une année record après celle de… 2019 (quasiment 129 millions de nuitées vendues).
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En parallèle, l’activité s’améliore aussi dans l’hôtellerie, très éprouvée par la crise sanitaire , en particulier à Paris et dans les grandes agglomérations. La multiplication des déplacements de loisirs contribue au remplissage des établissements, sachant qu’une reprise partielle du tourisme d’affaires est amorcée. D’après le groupe d’études et de conseil spécialisé MKG, la recette unitaire du week-end s’avère, depuis quelques semaines, supérieure à celle de 2019. Autre élément significatif : les réservations sont désormais davantage anticipées quand bien même la demande de dernière minute reste forte.
Le retour de clientèles étrangères
Outre une consommation domestique soutenue, cette dynamique du tourisme français s’explique aussi par la confirmation du retour des clientèles étrangères. A la fin mars, l’augmentation de leurs réservations s’élève ainsi à 24 % pour les campings par rapport à 2019. La progression s’élevant à 9 % pour les Néerlandais, premiers visiteurs de l’Hexagone avec 10 % des nuitées en 2019. Simultanément, la fréquentation des Allemands bondit de moitié, tandis qu’un phénomène de rattrapage est amorcé pour les Anglais avec un retrait ramené à -4 % par rapport à 2019. Mais le regain de fréquentation des Européens n’est toutefois pas encore généralisé. Chez Pierre & Vacances, on constate qu’elle « n’est pas encore au niveau de 2019 ».
De leur côté, les hôteliers relèvent aussi « le retour des Américains », tangibles dans l’amélioration des performances des établissements parisiens, en particulier haut de gamme, relève MKG. En revanche, les clientèles asiatiques se font encore rares.
L’attrait de tous les territoires
L’impression de vitalité de la destination France est d’autant plus forte que la hausse des réservations vaut pour toutes les régions, même si les littoraux sud-est, sud-ouest et Bretagne sont « les territoires gagnants » selon le directeur général de Protourisme, Didier Arino. « C’est vert partout ! », se félicite Nicolas Houé, le directeur général de Capfun, un poids lourd des campings.
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Le succès confirmé de la montagne et la vitalité persistante d’un réseau de locations de vacances comme Gîtes de France témoignent de cette tendance sociétale renforcée lors de la crise sanitaire qu’est le « tourisme vert » . « 2022 s’annonce comme une année record », indique la directrice générale de Gîtes de France, Solange Escure, en mentionnant des niveaux de réservations en hausse par rapport à 2019 pour les vacances d’avril (+8 points), juillet (+8) et août (+3).
« En 2020 et 2021, les Français n’avaient pas vraiment eu le choix de leur destination. Là, ils ont vraiment anticipé pour l’été. Cela devient compliqué de trouver un hébergement avec piscine », constate-t-elle, soulignant, au passage, une quête d’un « hébergement très qualitatif ».
Inflation et manque de main-d’œuvre
Si l’horizon du secteur semble se dégager après deux années très délicates, il demeure tout de même quelques nuages dans le ciel. A commencer par le contexte inflationniste. Même s’il favorise un tourisme de proximité, le renchérissement du prix des carburants est notamment susceptible d’influer sur le comportement des consommateurs-vacanciers. « Il y a une dynamique. On a repris la trajectoire de 2019 mais l’été n’est pas encore gagné », juge le président de Belambra – le numéro un des clubs de vacances en France -, Alexis Gardy.
Il y a aussi une autre angoisse, celle du manque de ressources humaines et la difficulté de recruter des saisonniers restent d’une actualité brûlante. Une menace réelle pour la qualité de service et l’image de la France.