Note de Lecture N°22 : Le tourisme après la crise
Par Jonathan Custeau
Canadien. Journaliste, blogueur, aventurier modéré.
En 2011, il choisi de mettre en ligne un blog qui raconte son épopée à travers le monde pour garder la plume alerte, pour ne pas trop s’évader.
Juste assez. Pour donner des nouvelles aussi. Et pourquoi pas, pour situer ceux et celles qui souhaiteraient un jour réaliser une folie semblable.
4 avril 2020
En ce moment, tout n’est que spéculation. Difficile, alors que la crise n’est pas terminée, d’entrevoir le moment où les activités économiques reprendront.
Paul Arseneault, professeur à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM et titulaire de la Chaire de tourisme Transat, souligne qu’il ne s’agit pas d’une crise normale et que rien ne permet d’établir des scénarios solides. « Ce qu’on connaît, ce sont des crises localisées alors que ça se passe bien dans le reste du monde. Maintenant, toutes les destinations touristiques sont touchées. »
Des grands hôtels sont fermés. Des restaurants risquent de ne pas traverser la crise si elle se prolonge. « Même à la fin de la crise, est-ce que tous ces établissements seront ouverts ? Seront-ils en mesure de relancer leurs activités rapidement ? »
La distanciation sociale, si ce ne sont pas les difficultés financières personnelles, risque aussi de laisser des traces, d’en convaincre plusieurs de rester à la maison. Ceux qui auront redécouvert le plaisir de cuisiner délaisseront peut-être les restaurants.
La distanciation sociale aura-t-elle raison du tourisme d’affaires ? De toute évidence, les organisateurs de congrès n’ont pas l’intention d’annuler les événements de 2021 selon les premiers constats. Et Paul Arseneault croit que les gens d’affaires seront les premiers à remplir les avions.
« Tellement de vols auront été reportés ou annulés que les avions seront pleins et les prix exploseront probablement. Les compagnies aériennes n’auront pas assez de liquidités pour jouer la concurrence des bas prix. »
Bonne chance pour utiliser les crédits offerts par les compagnies aériennes…
On pourrait aussi voir l’imposition de règles sanitaires plus importantes dans les avions, comme la désinfection beaucoup plus fréquente des cabines. Irons-nous jusqu’à porter des masques pour les transports aériens ? Peut-être. L’idée d’être à nouveau cordé pendant plusieurs heures dans une carlingue n’a rien de bien séduisant.
Je m’interroge aussi sur les mesures qu’on implantera dans les aéroports et sur leur impact les premières années. Enlever les chaussures, les ceintures, limiter les liquides, passer un scan… On s’y est habitué, même si, chaque fois, je pousse un soupir long comme le temps qu’ils mettent à ouvrir les portes d’avion après l’atterrissage. Prendra-t-on notre température ? Exigera-t-on des mesures sanitaires plus importantes ? Une quarantaine ? Pourrons-nous encore voler si une vilaine toux cherche à nous clouer au sol ? Faites le plein de patience !
Parce qu’en général, après une crise, tout finit toujours par revenir à la normale. Seulement, dans ce cas-ci, le retour pourrait être long. On parle déjà de mois, mais la relance pourrait s’échelonner sur plus d’un an. Il faut d’abord compter la crise elle-même, dont on ne voit pas le bout, et plusieurs mois par la suite pour repartir la roue.
« Je suis convaincu que ça reviendra, mais ce ne sera pas facile », résume Paul Arseneault.
Malgré tout l’amour que je porte au voyage, je ne suis pas complètement fâché de cet arrêt forcé. Pas fâché de prendre un pas de recul, de respirer, de réfléchir à comment je veux voyager dans le futur : plus lentement, plus en respect des lieux qui m’accueillent. Peut-être aussi pouvons-nous enfin prendre conscience que nos gestes ici, là-bas, peuvent avoir un réel impact. Que tout est interrelié. Qu’on a besoin l’un de l’autre. C’est ce que je trouve beau du voyage : réaliser l’importance de l’autre.
Si je ne peux avoir qu’un souhait, ce sera celui qu’on ait assez vu la couleur de nos quatre murs pour arrêter d’essayer d’imposer ou de reproduire nos habitudes quand on visite une autre région, un autre pays. J’espère qu’on trouvera ou qu’on retrouvera le goût de s’intéresser à l’autre, à ses habitudes, à ses traditions, et qu’on se permettra d’investir davantage dans les initiatives locales que dans les chaînes qui nous proposent « la maison à l’étranger ».
Et j’en tire la leçon, probablement comme beaucoup de Québécois, que les agences de voyages peuvent nous éviter bien des soucis. À l’avenir, peut-être leur accorderons-nous à nouveau une plus grande confiance.