Partez à l’assaut des montagnes de Chine
Depuis quelques semaines, nous vous invitons à visiter la Chine autrement, témoignant des nouvelles façons de voyager mais aussi de la capacité des agences de voyage à innover en permanence. Cette semaine, en route pour les montagnes chinoises, zone méconnue et encore peut touristique.
La Chine, l’un des plus grands pays du monde, offre une multitude de paysages et des parcours inimaginables, loin des circuits touristiques habituels, beaucoup plus authentiques et proches de la nature, à l’image de ses paysages montagneux : Hunan – Jiangxi – Anhui.
Hunan
Au sud du lac Dongting, se trouve le Hunan, réplique sudiste du Hubei en quelque sorte. Cette province est célèbre pour ses montagnes, son relief karstique et ses cascades, son histoire dramatique des XIXe et XXe siècle (révolte des Taiping en particulier) et son fils prodige. En effet Mao Zedong est né à Shaoshan près de la capitale provinciale, Changsha.
Avant de partir en excursion sur le lac Dongting ou dans les montagnes, n’oubliez pas de goûter à la gastronomie locale, raffinée et pimentée. La cuisine du Hunan est l’une des huit cuisines régionales. Le plat hongshaorou, à base de viande de porc grillé et de haricots rouges, était le plat préféré du président Mao. Ce dernier le voulait très épicé alors que normalement ce plat ne l’est pas…
Hunan ——– Zhangjiajie
Près de la petite ville de Zhangjiajie se trouve l’immense parc naturel de Zhangjiajie (130 km2) classé au Patrimoine de l’Humanité par l’Unesco en 1992. On raconte qu’un membre de l’équipe du film Avatar a passé quelques jours au milieu des pics et en a tiré les invraisemblables paysages flottants du film de James Cameron. Typique du relief karstique, la région est un entrelacs de colonnes de pierre surmontés de végétation. Il est possible de rester jusqu’à une semaine à l’intérieur du parc.
N’hésitez surtout pas à explorer par vous-même. De bonnes chaussures, un pull, un parapluie, un vêtement de pluie, de l’eau et de la nourriture et vous voilà parti(e) pour une randonnée à nulle autre pareille en Chine, royaume de la jungle urbaine. Très tôt le matin est le meilleur moment pour voir « en vrai » ce que toutes les peintures et cartes postales montrent : des montagnes perdues dans les nuages, à moins que ce ne soit le contraire…
Parmi les pics à ne pas rater, le mont Tianmen (la porte du Ciel, rebaptisée Hallelujah par le maire de Zhangjiajie en référence au film de Cameron). Quelques monastères vous y attendent pour une retraite éclair.
Hunan ——– Xiangxi
La préfecture autonome Tujia et Miao de Xiangxi est une région au nord-ouest du Hunan occupée par de nombreuses « minorités nationales » dont les Miao et les Tujia. Outre le fait que ces régions « autonomes » répondent à l’envie passagère, qui guette le voyageur au long cours dans ce pays, de ne pas être tout à fait en Chine, on vient dans la préfecture de Xiangxi pour la vieille ville de Fenghuang, la ville phœnix.
De vieilles histoires racontent que deux de ces animaux fabuleux volant au-dessus de la cité l’avaient trouvé si belle qu’ils y avaient élu domicile, remettant toujours à plus tard leur départ. Il est vrai que le site où est bâtie la cité est magnifique et prodigue en montagnes, eaux vives et ciel bleu. Rappelons que « paysage » se dit en chinois par l’association des mots montagne et eau – shanshui.
Ne manquez pas les ponts qui traversent la rivière Tuo, les vieilles maisons sur les rives de la rivière ont le parfum inégalable de la Chine éternelle, telle qu’on peut la voir sur les images et dans les films. À l’opposé de Fenghuang, se trouve le site de Yongshun Laosicheng tusi, un des sites Tusi les plus anciens et les mieux conservés.
Fondé en 910, il s’agit d’un petit territoire érigé en une sorte de domaine indépendant, nommé Tusi en référence au nom de son chef. Le pouvoir du Tusi était héréditaire. La famille Peng l’a transmis de génération en génération, au travers de 9 dynasties, 27 générations. Les Qing ont aboli cette anomalie en 1727. Aujourd’hui, il reste une cité ancienne au charme indéniable.
Jiangxi
Passage obligé entre le Nord et le Sud de la Chine pendant des siècles, le Jiangxi conserve ce rôle grâce au tourisme. Ses passes entre les montagnes sont spectaculaires et méritent que l’on s’y arrête. Les monts Lu (Lushan) inspirent toujours peintres et photographes mais aussi les amoureux. Pourtant, peu nombreux sont les touristes. Une occasion de sortir des sentiers battus !
Pourquoi ne pas aller jeter un coup d’œil à Jinggangshan, lieu de départ de la Longue marche (octobre 1934) ? Ou encore observer les oiseaux migrateurs qui se reposent en hiver près du lac Poyang au nord-est de Nanchang ? À moins que vous ne préfériez méditer sur le sens du non-agir en vous promenant dans le mont Sanqing, haut lieu du taoïsme.
Si vous êtes amateur de porcelaine, un détour par le village de Jingdezhen, capitale de la porcelaine chinoise, s’impose. Pour preuve de son immense réputation, en anglais porcelaine se dit « china ».
Jiangxi ——– Lu shan
Dans la culture et la civilisation chinoise, la montagne a une place spéciale. Elle est à la fois résidence des brigands et objet de vénération religieuse (taoïste aussi bien que bouddhiste, voire même confucianiste). Les montagnes chinoises, réputées dangereuses en raison de leurs habitants, sont pourtant l’archétype du paysage dans lequel il est bon de méditer, d’écrire des poèmes. Gao Xinjian, prix Nobel de littérature a d’ailleurs écrit un roman nommé la Montagne de l’âme dans lequel l’auteur parcourt la Chine à la recherche de lui-même.
Bien entendu, c’est dans les montagnes qu’il se trouve. Les monts Lu sont parmi les plus belles montagnes de Chine. Relativement peu élevé (le sommet le plus haut est à 1473 m d’altitude), les monts Lu sont protégés par un parc d’une superficie de 500 km2, 90 sommets y élisent domicile.
Parmi ceux-ci, le mont Hanyang (1473 m d’altitude, le plus élevé), que l’on vient visiter pour ses chutes d’eau et ses immenses falaises. Le mont Wulao (1436 m, le mont des cinq anciens) dresse ses cinq pics fièrement dans le paysage de brumes. Au pied de ce sommet, la grotte de l’académie du daim blanc rappelle que le poète Li Bo (mort en 831, dynastie Tang, ne pas le confondre avec le grand poète Li Bai) y éleva un daim blanc.
Ce n’est pas tout à fait une grotte, mais plus un ensemble de bâtiments élevés autour et au-dessus d’une cavité contenant une stèle décrivant la tendre histoire et une statue d’un daim. Situé dans les monts Lu, le village Guling est particulier dans le sens où il servait, au XIXe siècle de lieu de villégiature aux Occidentaux présents le long du fleuve Bleu. Se promener dans ce village est comme prendre une bouffée de nostalgie.
Jiangxi ——- Shangrao
Shangrao (prononcez shang-jao) est une petite ville située au nord-est de la province du Jiangxi, près des provinces du Zhejiang et de l’Anhui. On y vient surtout pour les monts Sanqing. Mais qui sont ces trois (san) esprits (qing) ? Il s’agit des sommets Yujing, Yuxu et Yuhua qui ressemblent à s’y méprendre aux trois esprits divins Yuqing, Shangqing et Taiqing, tous trois issus du monde taoïste. La montagne est un mélange réussi de la beauté de Huangshan, du sens du spectaculaire du mont Emei, des nuages de Lushan et les parois abruptes de Huashan.
Cascades, rochers de granite aux formes étranges rivalisent d’attraits avec les nombreuses espèces végétales et animales pour attirer les esprits du taoïsme sur eux et accessoirement les touristes.
Ainsi, les nombreux rochers qui semblent avoir été sculptés par quelque dieu de la Nature sensible aux affaires humaines : la Déesse orientale, le boa géant, les milliers de sommets concourant pour être le meilleur, les trois dragons se ruant vers la mer, sans oublier naturellement Guanyin, la déesse de la Compassion (divinité bouddhiste, pourtant ; mais le taoïsme et le bouddhisme se retrouvent volontiers sur certains terrains neutres).
Soudain, dans votre promenade dans ce « musée » de sculptures à ciel ouvert, la mer de nuage (indispensable phénomène céleste de toute montagne chinoise digne de ce nom) prend le pas et vous transporte dans un monde fantastique, presque inquiétant, duveteux, serein et relevant du bizarre. Ainsi la cascade de nuages, la lumière des esprits de Sanqing, la route des cinq couleurs vers les nuages et la pluie de météores.
Anhui
À l’ouest de Shanghai, la province de l’Anhui charme par ses sublimes paysages et sa richesse culturelle. Les principaux sites se concentrent au sud, où les immenses étendues de rizières côtoient des chaînes de montagnes spectaculaires. Les Montagnes jaunes (Huangshan) exercent toujours la même fascination sur les visiteurs, venus en pèlerinage dans ce lieu enchanteur, connu pour son paysage grandiose composé de nombreux rochers et pics granitiques émergeant d’une mer de nuages.
À leurs pieds, les villages de Hongcun et Xidi raviront les amoureux d’architecture avec leurs somptueuses demeures Ming et Qing couvertes de boiseries.
Anhui ——– Huangshan
Autrefois appelé Yishan, Huangshan a pris son nom actuel depuis que l’empereur Jaune y serait venu chercher l’élixir d’immortalité… en 2 600 av. J.-C.
Écoutons Xu Xiake, grand voyageur et géographe, de la période Ming, s’exprimer sur Huangshan : « Après avoir fait l’ascension du Huangshan, aucune autre montagne ne sera capable de vous éblouir autant, car c’est là que se trouve toute la beauté du monde ! »
Du sommet, vous serez plongé dans une impressionnante mer de nuages d’où vous distinguerez les pics de granite aux formes étranges et leur forêt de pins tortueux. Vision féérique garantie. Vous pourrez également profiter des eaux limpides des sources d’eau chaude pour vous y baigner.
Huangshan se visite au printemps pour le charme de la végétation en éveil, en été pour la fraîcheur particulièrement agréable, en automne pour ses couleurs multicolores et en hiver pour un monde blanc de glace et de neige.
Huangshan, zone touristique nationale AAAAA, est renommé dans le monde entier. En 1990, Huangshan a été inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco. En 2004, Huangshan devient un géoparc international.
Non loin de Huangshan se trouvent Xidi et Hongcun, deux villages typiques, classés au patrimoine mondial de l’Unesco, dont les nombreuses résidences construites sous les dynasties Ming et Qing sont remarquables par leur architecture, constituée d’une structure de bois et de murs de briques, sans oublier leurs magnifiques décorations sculptées.
Anhui ——– Jiuhuashan
Au nord-est de Huangshan, Jiuhuashan, littéralement « Montagne des neuf lotus », est l’une des quatre montagnes sacrées bouddhiques de Chine. Outre les hommes de lettres qui de tous temps se sont rendus ici pour y trouver l’inspiration, Jiuhuashan est aussi un lieu de recueillement pour tous ceux qui viennent de perdre un proche, car il abrite l’esprit de Dizang, dieu des Morts et de l’Au-Delà.
Pour son ascension, on rejoint d’abord le village de Jiuhua, situé à mi-hauteur de la montagne d’où partent des escaliers pour rejoindre le sommet. Prenez le temps de visiter quelques-uns des 90 temples accrochés aux flancs de la montagne, surtout le temple Huacheng, le plus grand et le plus ancien, dont les sculptures décorant les linteaux et les toits ainsi que la peinture représentant « neuf dragons jouant avec des perles » ne sont pas sans rappeler l’art chinois d’antan.
Vous verrez aussi des grottes ayant servi en leur temps d’ermitage avant d’atteindre le sommet.